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Mélanie Bilodeau : 5 questions sur le sommeil du tout-petit

Parentalité positive
Publié le 22/01/2024
22/01/2024

Le sommeil des tout-petits, c’est LE sujet sur lequel Mélanie Bilodeau se fait le plus souvent poser des questions. On ne se fera pas de cachette : le sommeil — ou plutôt le non-sommeil — représente l’un des plus grands défis de la vie quotidienne avec des enfants.

C’est donc pour aider les parents à accompagner leur enfant vers le sommeil que la psychoéducatrice chouchou des parents a écrit le livre Être un parent sécurisant : le sommeil du tout-petit. Elle a également coécrit l’album pour enfants Mon petit train du dodo avec sa collègue psychoéducatrice Laurence-Emmanuelle Dumas, un livre magnifiquement illustré conçu pour favoriser le sommeil des enfants.

Pour introduire ces deux ouvrages, nous avons posé 5 questions à Mélanie concernant le sommeil des tout-petits.

Texte partiellement tiré du livre Être un parent sécurisant : le sommeil du tout-petit, écrit par la psychoéducatrice Mélanie Bilodeau.

1. Dans ton livre, tu parles d’accompagner le tout-petit vers le sommeil. Est-ce qu’on peut réellement apprendre à un enfant à s’endormir? Comment?

Mélanie Bilodeau : D’abord, il faut savoir que le sommeil est un processus autonome. Déjà, pendant sa vie intra-utérine, le fœtus sait très bien dormir naturellement, par lui-même. Tout comme il peut répondre à ses besoins vitaux liés à l’alimentation et à l’élimination. Il sait déjà déglutir et uriner quand le besoin se fait sentir. Il en va de même avec le sommeil. Le tout-petit sait très bien s’endormir. Nul besoin de le lui enseigner.

Autre nuance : personne « n’endort » un enfant. Certes, se faire bercer dans vos bras réconfortants au son de votre voix de cantatrice virtuose facilite grandement l’endormissement. Mais soyons honnêtes, à part Messmer, personne n’a le pouvoir d’endormir quelqu’un sur commande. (Et c’est tant mieux! Ce serait inquiétant, non?) On ne peut tout simplement pas appuyer sur le bouton dodo de l’enfant. Eh oui, c’est dommage. Néanmoins, on peut mettre en place des conditions favorables à l’endormissement du tout-petit. On peut lui « apprendre » à s’endormir de manière autonome lorsqu’il est prêt (j’ai bien dit : lorsqu’il est prêt), mais lui « apprendre à s’endormir », non. Déjà, le choix des mots utilisés quand on parle d’accompagnement au sommeil peut contribuer à changer notre façon de percevoir les défis qui se présentent, tout comme cela peut influencer notre posture parentale. Avoir des attentes réalistes permet de se décharger de la responsabilité de « réussir à endormir » son enfant.


2. On le sait bien, certains parents prônent que cela ne fait pas de tort de laisser un enfant pleurer à l’heure du dodo, alors que d’autres sont totalement contre cette idée. Qu’est-ce que tu recommandes à ce sujet?

Mélanie Bilodeau : Les recherches récentes en neurosciences affectives et sociales sont très claires : le jeune enfant a besoin de l’adulte pour réguler ses émotions, et il est déconseillé de le laisser pleurer seul pendant de longues périodes. On me demande souvent à quel âge il est possible de laisser pleurer un enfant. La réponse : jamais! Ou disons plutôt jamais sans accompagnement. Être à proximité, offrir du réconfort et du soutien à l’enfant en pleurs, même sans le prendre dans nos bras, ce n’est PAS le laisser pleurer.

Le problème, ce n’est pas que l’enfant pleure, c’est qu’il ne soit pas accompagné quand il pleure. Dans la petite enfance, les pleurs ne sont pas intentionnels. L’enfant ne joue pas la comédie. Il ne fait pas exprès de pleurer, pas plus qu’il ne fait de caprices ou qu’il tente de vous manipuler en pleurant.

Ainsi, jusqu’à un an, on ne se pose pas de questions : on répond aux pleurs du bébé dans le délai le plus court possible. À partir d’un an, un enfant qui a été bien sécurisé sur le plan affectif depuis sa naissance pourra tolérer un court délai de quelques minutes avant qu’un adulte réponde à ses pleurs. Il ne sera pas en détresse pour autant. Toutefois, il a encore énormément besoin de l’adulte pour s’apaiser. C’est autour de l’âge de 18 mois qu’il est possible de commencer à imposer certaines limites à l’enfant. C’est le début d’une période de différenciation et d’affirmation de soi qui nécessite qu’on décide du cadre éducatif que l’on souhaite offrir à l’enfant. C’est aussi à cet âge que le tout-petit, s’il se sent en sécurité, pourra mieux tolérer le malaise généré par la frustration sans pour autant vivre de la détresse. C’est ce que j’appelle les pleurs de protestation. L’enfant n’est pas en détresse : il proteste. Cependant, dans un cas comme dans l’autre, il a besoin qu’on accueille sa frustration et qu’on l’accompagne. C’est donc dire que vers 18 mois, on peut commencer à imposer des limites à l’enfant dans l’accompagnement au sommeil qu’on lui offre. Je vois deux avantages principaux à cela : d’une part, cela permet d’éviter d’atteindre sa propre limite de patience et de bienveillance et, d’autre part, c’est un geste concret pour favoriser le développement de l’autonomie au sommeil. Mais attention! Instaurer des limites, ça ne veut pas dire menacer, faire du chantage ou donner des punitions. L’accompagnement au sommeil doit toujours se faire avec chaleur et empathie.


3. Le cododo est assurément une pratique controversée. À ton avis, c’est une bonne idée ou pas?

Mélanie Bilodeau : Voilà un sujet de grandes conversations — et de quelques conflits! Il y a les pro et les anticododos. Il y a les fervents du partage de la chambre qui refusent le partage du lit. Il y a ceux qui visent le sommeil autonome le plus vite possible chez l’enfant et ceux qui croient au sevrage naturel du sommeil partagé. Tout compte fait, il y a autant d’aménagements d’espaces et d’accommodements au sommeil qu’il y a de familles et de réalités. Aucun arrangement n’est meilleur qu’un autre! L’important est que la situation soit sécuritaire, qu’elle réponde aux besoins affectifs de l’enfant et, surtout, qu’elle convienne à l’ensemble des membres de la famille. Il est essentiel que tous dorment en paix et en sécurité et bénéficient d’un sommeil récupérateur. Le reste dépend des valeurs, des défis et du vécu de chacun des membres de la famille. Voilà, c’est dit. On passe à la prochaine question?


4. On entend de plus en plus parler de la fameuse mélatonine. En donner à un enfant qui ne s’endort pas, c’est bon ou pas?

Mélanie Bilodeau : Le corps produit naturellement de la mélatonine. Avant de recourir à un supplément, je propose de commencer par évaluer les facilitateurs et les perturbateurs de sommeil présents dans la vie de l’enfant afin de mettre des conditions favorables en place. Au besoin, vous pourriez aussi consulter un professionnel spécialisé en sommeil de l’enfant. Cela dit, si vous avez tout essayé, les suppléments de mélatonine sont disponibles en vente libre. Néanmoins, si vous considérez cette option, il est souhaitable qu’elle demeure temporaire, sans quoi elle pourrait devenir une béquille à long terme. Le sommeil dépend de plusieurs facteurs. Il importe de chercher la cause des difficultés afin d’intervenir de manière appropriée. De toute façon, si les suppléments de mélatonine facilitent l’endormissement, ils n’ont pas pour effet de faire diminuer les réveils nocturnes. Il n’y a jamais rien de miraculeux!


5. Dans ton livre, tu insistes souvent sur l’importance des rituels et de la routine avant le coucher. Mélanie, c’est quoi une bonne routine de dodo?

Mélanie Bilodeau : D’abord et avant tout, la routine doit être POSITIVE. On souhaite que l’enfant associe l’heure du dodo à un moment calme et agréable, lors duquel lui sont proposés des activités et des rituels qu’il aime.

Une routine de dodo est une série d’activités et de rituels répétitifs et prévisibles qui reviennent tous les soirs, environ trente minutes avant d’aller au lit : brosser les dents, mettre le pyjama, faire pipi, choisir une histoire. Pour ma part, je n’inclus pas le bain dans la routine, puisque celui-ci peut être un moment de jeu, de temps partagé ou de détente qui n’a pas besoin d’être écourté. Une fois l’enfant au lit, la routine et les rituels ne devraient pas dépasser 15 à 20 minutes.

Mon expérience clinique m’a démontré qu’une routine efficace et sécurisante comprend trois moments distincts :

  1. Un moment de transition entre les activités de la journée et l’heure du dodo;
  2. Un moment avec la lumière fermée, dans le lit;
  3. Un moment consacré à la séparation d’avec le parent.

Chacun de ces moments est important pour répondre au besoin de connexion de l’enfant avec son parent. Cela lui permet de remplir son réservoir d’affection et de vivre la séparation plus facilement, en se sentant en sécurité. Le mot clé? Connexion!


Pour aller plus loin



Couverture du livre Être un parent sécurisant : le sommeil du tout-petit de Mélanie Bilodeau.


Être un parent sécurisant : le sommeil du tout petit

Toujours avec le ton humoristique et déculpabilisant qui la caractérise, Mélanie a écrit ce guide dans l’optique d’aider les parents à mieux comprendre les enjeux sur lesquels ils ont réellement du pouvoir à l’heure du dodo. En plus de déconstruire certains mythes sur le sujet et de répondre aux principales questions des parents, elle y propose des stratégies concrètes pour favoriser le sommeil des enfants selon son approche de la parentalité sécurisante.




Couverture du livre Mon petit train du dodo de Mélanie Bilodeau et Laurence-Emmanuelle Dumas.

Mon petit train du dodo

Dans ce livre magnifiquement illustré, coécrit par Mélanie Bilodeau et sa collègue psychoéducatrice Laurence-Emmanuelle Dumas, chaque élément de l’histoire est conçu pour instaurer une routine du dodo sécurisante et pour favoriser le sommeil du tout-petit (et donc celui de ses parents aussi!). Parce que l’heure du dodo, ce n’est pas toujours de tout repos!

Illustrations : Nadia Berghella


 

À propos de Mélanie Bilodeau


Mélanie Bilodeau est une conférencière, chroniqueuse et formatrice très courue, aux indéniables talents de communicatrice. Elle a développé une expertise novatrice et encore peu exploitée en psychoéducation, soit celle de la psychologie périnatale. Elle dirige la Clinique Mélanie Bilodeau Psychoéducation, qui propose des services de consultation et d’accompagnement, en plus d’offrir diverses formations destinées aux éducatrices et aux professionnels en périnatalité et en petite enfance. Elle est également conceptrice du modèle conceptuel de la parentalité sécurisante, autrice des best-sellers Soyez l’expert de votre bébé et Soyez l’expert de votre tout-petit et heureuse maman de trois enfants.


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Affiche présentant 7 rappels essentiels à l'heure du dodo.

7 rappels essentiels à l'heure du dodo (à télécharger gratuitement!)

À l’heure du dodo, est-ce qu’il vous arrive de vivre du découragement? Ou encore de douter de l’efficacité avec laquelle vous accompagnez votre tout-petit vers le sommeil? Si oui, prenez un moment pour lire ces 7 rappels essentiels. Cet aide-mémoire vous aidera à vous souvenir des raisons pour lesquelles vous souhaitez accompagner votre enfant de manière empathique et sécurisante.